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Courir à la catastrophe : Les réponses au COVID s’appuyant sur le système alimentaire industriel

Un nouveau rapport de FIAN International signale que le système alimentaire industriel fait basculer beaucoup de personnes vers la faim et la malnutrition au lieu de nourrir le monde durant la pandémie.

Suite à son analyse préliminaire en avril, FIAN International publie un nouveau rapport documentant les impacts du COVID-19 sur le droit à l’alimentation. Le rapport souligne que les mesures d’atténuation du COVID-19 sont centrées sur le système alimentaire industriel, et poussent un certain nombre de secteurs professionnels et de couches de la société vers la faim et la malnutrition. S’appuyant sur des dizaines de soumissions de partenaires locaux et nationaux à travers le monde, le rapport de FIAN International met également en lumière l'impact positif des actions de solidarité.

Selon le rapport, les partisans de l’approche malthusienne des crises alimentaires – qui est basée sur la relation mathématique entre la nourriture disponible (offre) et les besoins de la population (demande) – nieraient très probablement qu’il y a actuellement une crise alimentaire. Cependant, cette approche ne tient pas compte de l’impact que la crise du coronavirus a sur l’accessibilité physique et économique, l'adéquation et la durabilité des aliments. En d'autres termes, bien que la nourriture puisse être disponible, certains groupes marginalisés ne sont tout simplement pas en mesure d'accéder à une nourriture suffisante et adéquate, en raison de la pandémie.

« Dans certains pays et parmi certaines populations et certains secteurs professionnels – y compris les personnes rendues pauvres, victimes de discrimination et celles qui travaillent dans le système alimentaire – l’existence de multiples crises alimentaires est indéniable. Avec la pandémie, les mesures d'atténuation et de rétablissement se sont souvent appuyées sur le système alimentaire industriel et ont négligé le rôle des petit-e-s product-rices-eurs alimentaires et des systèmes alimentaires locaux. Cette approche pousse ces groupes, encore plus qu'auparavant, vers la faim et à la malnutrition », explique Ana María Suárez-Franco, Représentante permanente de FIAN International auprès de l'ONU.


Le rapport souligne dans ses conclusions que :

  •  L'augmentation et la non-réglementation des prix des denrées alimentaires rendent les aliments inaccessibles pour des millions de personnes, avec des cas de triplement et de quadruplement des prix. Cela se produit en raison de la spéculation, la volatilité des prix des denrées alimentaires affectant de nombreux pays, notamment l’Argentine, l’Équateur, l’Ouganda, l’Afrique du Sud, la France et le Salvador.
  • Des tonnes de cultures et de bétail sont respectivement détruites et euthanasiées, les marchés locaux étant fermés en Équateur, en Colombie, au Zimbabwe, au Sénégal, au Mozambique et aux États-Unis. Cela laisse des centaines de milliers de petit-e-s product-rices-eurs sans revenu et des millions de personnes sans accès à des aliments frais, diversifiés et sains.
  • Les gouvernements américain, colombien et équatorien, entre autres, favorisent la consommation d’aliments agro-industriels et ultra-transformés en accordant la priorité aux supermarchés par rapport aux marchés locaux. Les régimes à base de ces aliments augmentent notre probabilité de souffrir de malnutrition, affaiblissant ainsi la capacité de notre système immunitaire à résister aux maladies.
  •  Les activités commerciales qui nuisent à l’environnement et aux droits humains ont augmenté à mesure que les politiques environnementales ont été assouplies et que la pression des entreprises s’est renforcée pendant la pandémie. Des cas concrets ont été identifiés aux États-Unis, en Chine, au Cambodge, aux Philippines, en Colombie, en Bolivie et en Afrique du Sud, et dépassent leurs frontières.
  •  Les femmes sont touchées de manière disproportionnée par COVID-19. En plus d’être davantage exposées à la violence domestique et au risque de perdre leur emploi dans les secteurs informel et formel dans le cadre de mesures de confinement, elles font face à la charge croissante du travail de soins non rémunéré. Dans certains pays, le repas scolaire étant le seul aliment dont dispose la famille, les femmes pourraient sacrifier sa portion pour les membres de leur famille, ce qui aurait un impact sur leur droit à l’alimentation.
  • Le racisme structurel a exacerbé l’impact de la pandémie sur les communautés noires, avec des hospitalisations et des risques d'infection liés au COVID-19 plus élevés, ainsi qu'une surreprésentation dans les emplois les plus touchés par la pandémie.
  • Le manque d'assistance et de soutien aux peuples autochtones a entraîné une augmentation du nombre de décès, en particulier parmi les anciens qui sont considérés comme les détenteurs de la sagesse, de la langue et des connaissances dans les communautés.
  • Les travailleu-ses-rs de l'alimentation – de ceux et celles dans la production industrielle de viande en Europe et aux États-Unis, aux travailleu-ses-rs agricoles migrant-e-s en Allemagne, aux vendeurs de rue en Afrique du Sud et aux pêcheurs en Inde – sont souvent plus exposés aux infections, aux conditions de travail précaires et à la famine.

Dans ce contexte, les fermetures soudaines qui perturbent l'approvisionnement alimentaire local ont déclenché diverses actions de solidarité dans les zones rurales et urbaines. L'Espagne, le Brésil, l'Afrique du Sud et la Colombie sont des exemples où les communautés locales et les mouvements sociaux se sont mobilisés pour garantir l'accès à la nourriture.


« Bien que nos gouvernements soient en fin de compte responsables de garantir le droit à l'alimentation des populations, les actions de solidarité ont été essentielles pendant la pandémie. Qui sait combien de familles auraient pu survivre sans ces réseaux de soutien », témoigne Suárez-Franco.


En effet, certaines idées innovantes de ces mouvements ont gagné la reconnaissance et le soutien des gouvernements locaux et nationaux.


« Les petit-e-s product-rices-eurs alimentaires trouvent des moyens appropriés de rendre les aliments sains disponibles sur les marchés en plein air, les ventes directes et d’autres canaux de distribution. Avec les consommat-rices-eurs, ils organisent des plateformes pour établir de nouvelles chaînes alimentaires territoriales rurales et périurbaines. En plus de soutenir de telles initiatives, les gouvernements doivent faire le pas vers la transformation de nos systèmes alimentaires : cela est non seulement crucial pour faire face à la pandémie actuelle, mais aussi futures. Le temps presse et nous devons prendre des mesures urgentes », ajoute Suárez-Franco.

 

Vous pouvez accéder au rapport ici.

Pour les questions relatives aux médias, veuillez contacter delrey@fian.org

 

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